Salle d’atente
(14 février 2011)
Je suis dans une salle d'attente.
C'est une pièce calme, un peu sombre, au décor minimaliste et plutôt terne
Il y règne une chaleur moite, un peu étouffante et délicieusement anesthésiante
Droite sur ma chaise comme si j'avais peur de tomber, je suis totalement immobile
Les deux mains soigneusement posées sur mes genoux, je patiente
Le balancier d'une vieille horloge accompagne le silence pesant
Aucun signe de vie ne parvient au delà de cette pièce
Je pourrais être la dernière personne vivante au monde...
Mon esprit plongé dans une rêverie indolente
Se moque totalement de cette attente
Il vit ses propres aventures, loin de la monotonie
Plonge avec délice dans une mer de plaisirs
Puis remonte vers les cieux libre de choisir
Depuis combien de temps suis-je ici ?
Quelques minutes ? Des heures ?
Ais-je jamais été ailleurs que dans ce ventre maternel clos insonorisé et chaud ?
Dans ce languissement tranquille, réservé
Pendant que ma pensée recréé le monde à sa façon
Je suis en sécurité, je peux imaginer à loisirs
Sans encourir le moindre déplaisir
Je pourrais rester là des années...
Pourtant mon corps gémit et craque
Animé de pulsations, de vibrations, de palpitations
Il est au coeur d'une vie active, il est le présent , le ici et maintenant
Il a un besoin urgent de se détendre, de bouger, et puis, il vieillit aussi
Très vite, trop vite
Il sent les derniers instants arriver, et regrette de n'avoir pas pu davantage en profiter
Entre ma conscience qui doucement s'endort au creux d'un rêve fabuleux
Et mon corps qui s'anime d'une volonté propre de vivre, se créé une dissension
Mais le corps à ses raisons que la raison ignore
Il finit par vaincre mon intellect nonchalant
Le pousse dans ses derniers retranchements
Le réveille d'une simple secousse au demeurant,
Et nous jette tous les deux au milieu de la salle
A la fois surpris et amusés de cette prompte réactivité
Cela fait trop longtemps que j'attends !
Je veux tout et tout de suite !
Je tourne en rond dans cette pièce devenue prison
Un frein à mes aspirations
Je veux, je veux, je veux....
Mes mains se tordent, s'entortillent, mes yeux s'embrument
Mais que fait-on ? Quand vient-on me chercher ? Et pourquoi suis-je ici ?
L'attente doucereuse devient torture, souffrance,
Soif de vivre, espoir, espérance
Je ne rêve plus, je désire de toutes mes forces,
Appelle la destinée à me transformer
Je fais des bonds, je transpire l'adrénaline que mes muscles absorbent goulûment
Je suis oh combien vivante, pressante, exubérante, impatiente, trépidante
L'univers m'appartient, je n'ai peur de rien !
Je suis prête à vivre pour de vrai toutes les aventures, mésaventures du monde,
Je peux vaincre tous les obstacles car mon énergie est infinie,
Je veux connaître les passions dévorantes, les amours absolus
Je veux vivre l'aventure, l'action, le documentaire, je veux tout savoir, tout faire !
Je continue de tourner, de virer comme un lion en cage,
J'ai créé une tranchée dans la salle d'attente transformée en champ de manoeuvre
Mais la porte alors s'ouvre et une jeune femme me dit poliement
-"Monsieur Royon va vous recevoir"
J'avais oublié, je viens pour postuler
Poste cadre C
Simple assistante administrative je suis
Je quitte à regret la salle d'attente
J'y aurais passé les plus belles heures de folie de ma vie
Ou minutes, je ne sais plus.
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